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Ultra White Violet Light / Sleep - The Charles Curtis Trio Biographie
ULTRA
WHITE VIOLET LIGHT / SLEEP - CHARLES CURTIS / THE CHARLES CURTIS TRIO
(Beau
rivage 1998. Beau rivage / Squealer 1999, double LP, double CD, 2000
)
Mercredi
6 décembre (voir la page concert),
nous avons eu la chance d’accueillir Charles Curtis et de l’entendre
interpréter ses propres pièces correspondant au double
album Ultra White Violet Light/Sleep, co-produit en 1999 par le label
américain Squealer et le label allemand Beau Rivage. L’album
a été en récemment édité CD, après
l’épuisement du premier pressage en vynile.
Il
s’agit de quatre pièces d’une vingtaine de minutes chacune
sur lesquelles Charles Curtis apparaît seul au violoncelle,
accompagné d’ondes sinusoïdales, de sons continus à
la guitare électrique, ou récitant ses spoken words.
La deuxième plage présente le travail de son trio, très
inspiré du Velvet Underground, dans lequel il tient la guitare
et le "chant", soutenu par la section rythmique Peter Imig et Henry
Grant.
Curtis,
dans une assez longue notice, fait des suggestions d’écoute
pour ces quatre morceaux, conçus pour une diffusion simultannée
sur de multiples appareils stéréo. Toutes les combinaisons
sont en effet envisageables : l’assemblage de 2, 3, ou des 4 faces
(pour la version vynile), de même que l’écoute séparée
des pièces. Curtis recense avec dérision toutes les
manières de procéder : de l’enregistrement préalable
d’une face sur cassette et sa diffusion par magnétophones,
walkman, à l’utilisation de DAT ou de platines de DJ’s. Il
ne préconise poutant pas l’achat de quatre exemplaires de l’album,
ni l’usage de matériel professionnel, conseillant plutôt
de se bricoler une installation et d’inviter ses voisins, en leur
faisant payer ce "concert" privé ! L’idéal serait alors
de tester les quinze combinaisons envisageables à suivre et
donc de s’immerger dans cette performance de musique minimale répétitive
d’une durée moyenne de 15 heures ! Où l’on peut voir
en quelque sorte que l’influence d’Andy Warhol et de ses films-fleuves
"Sleep" et "Chelsea Girls" ne se limite pas au double-titre de l’album
(Ultra Violet était une personnalité de la Factory…).
Ces
propositions de Charles Curtis qui sonnent comme un énorme
canular, sont pourtant issus de recherches sérieuses autour
de la spatialisation du son et la propagation des ondes sinusoïdales.
De fait, la fréquentation du compositeur La Monte Young dans
la seconde moitié des années 80 et l’étude, sur
ses conseils, de la musique classique indienne, ont amené Curtis
à exploiter leurs propriétés harmoniques, en
les utilisant en accompagnant, comme s’il s’agissait d’un bourdon
de sitar. Il s’est aperçu à cette époque des
répercussions qu’elles avaient sur sa pratique du violoncelle,
développant une nouvelle façon de s’accorder et de jouer
par leur nature apaisante et les modifications de l’écoute
qu’elles engendrent. 1
Pour
son premier enregistrement entièrement dédié
à ces conceptions, Curtis a donc souhaité s’assurer
que l’auditeur perçoive bien les propriétés physiques
des ondes sinusoïdales, notamment leur propagation et modulation
dans un espace sonore spécifique, d’où l’idée
d’un dispositif d’écoute pour spatialiser les sons de l’album,
et lutter contre le problème de la reproduction sonore des
ondes.
Charles
Curtis voit dans ces ondes sinusoïdales un mystère de
la Nature. En effet aucun son naturel, ni aucun instrument ne produisent
d’ondes sinusoïdales, mais des harmoniques qui s’en approchent.
Selon lui, chacun les entendrait naturellement, sans le savoir et
très faiblement. Elles sont le spectre sonore parfait des sons
et par conséquent flotteraient au-dessus d’eux, à deux
doigts d’être perçus. En cela, leur reproduction artificielle,
dont il abuse allègrement, est à ses yeux comme une
indiscrétion à l’encontre de leur volonté de
se cacher ! 2
Quand
un disours scientifique se penche sur l’Invisible, il confine rapidement
au mysticisme, aussi pouvons-nous avancer à notre tour que
ces fameuses ondes seraient en quelque sorte « le bruit de fond
de l’Univers », l’harmonie de la mécanique céleste,
la « ritournelle cosmique ».
3
1.Interview de Charles Curtis en 97, disponible sur le net : 2.Texte
de Charles Curtis accompagnant l’album
3.Gilles
Deleuze parlant de Stockhausen et de Mahler dans l’Abécédaire.
P.S. On peut lire une excellente chronique de l’album par Manu Holterbach dans Revue et Corrigé n°43, Mars 2000. |
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